3352 - Remarques sur la conclusion de la thèse d’Alexandre Carathéodory

N. Lygeros

Alexandre Carathéodory conclut sa thèse intitulée De l’erreur en matière civile d’après le droit romain et le code napoléon, en sept points.

  1. En matière de délits, il ne peut être question d’erreur, qu’en ce sens, que l’erreur exclut l’intention coupable que le législateur a le plus souvent en vue de punir.
  2. Dans les prétendues erreurs par omission, qu’il s’agisse de faire courir un délai préfixe ou de calculer un délai dont le point de départ serait marqué par la connaissance acquise de quelque fait, l’erreur n’y est pour rien par elle-même.
  3. Dans les restitutions, les motifs d’erreur, d’omission, etc., donnés le plus souvent par les textes, ne servent qu’à cacher de véritables modifications législatives.
  4. Dans les actes testamentaires, tout se décide d’après les règles concernant les formes prescrites par la loi, ou bien, d’après l’intention des parties, dans les cas, bien entendu, où cette intention est la loi suprême.
  5. Dans la théorie des obligations on est dispensé de toute règle particulière à l’erreur, pour l’interprétation logique et juridique de la convention.
  6. Il en est de même, bien que pour d’autres motifs, dans la théorie des quasi-contrats.
  7. Enfin même en matière d’acquisition de fruits et d’usucapion, la bonne foi qui y représente l’erreur n’est et ne doit être qu’une condition négative, le défaut de mauvaise foi.

Ces points mis en exergue par Alexandre Carathéodory permettent d’établir un résultat cohérent, à savoir que dans le droit romain, il n’existe pas d’effets propres à assigner à l’erreur, d’effets qui ne soient en même temps la conséquence d’autres principes. En d’autres termes, l’erreur s’il y a, dépend directement de l’axiomatique. Il est donc possible d’interpréter la recherche d’Alexandre Carathéodory comme une méthodologie analogue à la théorie des séquents en calcul proportionnel. En effet l’examen d’une proposition se fait par la remontée aux feuilles axiomatiques et l’absence d’incohérences internes permet de conclure quant à la véracité de celle-ci. Si au contraire cette proposition est fausse, la théorie des séquents permet de par sa méthodologie de retrouver les axiomes qui l’invalident. Ainsi elle offre une vision dynamique du problème puisqu’elle ne détermine pas seulement la falsification mais elle détecte aussi le contre-exemple. La recherche d’ Alexandre Carathéodory parvient à la conclusion que les erreurs si elles existent proviennent d’erreurs initiales mais en aucun cas elles n’apparaissent comme des intermédiaires. Cela donne une information globale sur la nature du droit romain. En effet celui-ci ne peut être complet car il engendre aussi des erreurs. Et le défaut de sa structure théorique se trouve dans son axiomatique puisque la manipulation des outils du droit n’engendre pas d’elle-même. Aussi Alexandre Carathéodory est parvenu à démontrer que la théorie de l’erreur de droit est en défaut. Il ne reste donc plus rien du cercle vicieux de la théorie de Savigny et de son système d’excusabilité. Comme le précise Alexandre Carathéodory la théorie de l’erreur de fait et de l’erreur de droit avait deux défauts irrémédiables :
1) celui de reposer sur une distinction insaisissable.
2) de ne pas faire voir quel est le fondement logique d’une règle aussi péremptoire, pouvant s’appliquer à toutes les questions de droit.