407 - Le missile anti-navire : un paradigme de la puissance du faible

N. Lygeros

Pour une armée dont l’effectif en termes d’hommes est restreint, le choix de ses armes de défense est fondamental. Ne pouvant miser sur la quantité, elle doit prendre soin de la qualité de son arsenal. De plus les armes choisies doivent être faciles à mettre en oeuvre même par un effectif réduit afin de rendre efficace une contre-attaque contre une attaque massive. Car il ne suffit pas de défendre en résistant localement ni d’avoir une grande infrastructure de mobilité réduite. Il est préférable de détenir des armes qui peuvent équiper des bâtiments de très petite taille qui seront plus souples sur les plans logistiques et tactiques.

Dans le cadre d’une île, en termes de masse, le plus grand danger est de type naval. Aussi les navires de guerre représentent les assaillants potentiels les plus redoutables. Et si cette île n’a que des effectifs réduits la possession d’une grande flotte est pour ainsi dire exclue. Cela ne veut bien sûr pas dire que toute défense est impossible. Pour pallier à cette situation les missiles anti-navires sont une arme de choix d’une redoutable efficacité qui compense leur coût élevé par rapport aux munitions classiques.

Il existe essentiellement deux types de propulsion pour les missiles. Le statoréacteur, turboréacteur et pulsoréacteur qui utilisent l’air ambiant comme comburant et qui ont une consommation faible. L’autopropulseur qui peut avoir deux étages avec un accélérateur et un propulseur de croisière. La voilure peut être fixe ou mobile. La voilure fixe est de forme cruciforme pour la stabilité du vol. Sa taille varie en fonction de la vitesse : grande pour les subsoniques, petite pour les transsoniques et supersoniques, enfin inexistante pour les hypersoniques. La voilure mobile est aérodynamique ou à réaction. Il y a trois positions pour les gouvernes aérodynamiques : formules empennage, ailes manoeuvrantes, canard. Tandis que les gouvernes à réaction sont indispensables pour un vol hors atmosphère. Les différentes méthodes de guidage sont : télécommandé, semi-actif, actif et passif. Mais le point le plus caractéristique des missiles anti-navires c’est l’autodirecteur. Celui-ci s’active en fonction de la distance de la cible. Il doit avoir un fort pouvoir de discrétisation : ses critères sont simples (via la vision initiale du radar) ou complexes (analyse de la crédibilité des échos via intelligence artificielle). Une fois la cible sélectionnée, l’autodirecteur se verrouille en angle et en distance via les techniques classiques. Enfin, sa trajectoire est agrémentée de manoeuvres terminales pour éviter les défenses rapprochées. Car il n’existe que deux manières de contrer un missile de type fixe and forget et sea skimmer : les leurrer ou les détruire. Les méthodes sont respectivement softkill (brouillage, leurrage) et hardkill (système d’armes très courte portée). Pour contre-lutter, il est judicieux de rendre le missile le plus furtif possible en diminuant sa surface équivalente radar ou sa surface de détection infrarouge et/ou le plus rapide possible pour diminuer le préavis des contre-mesures réactives.

Dans tous les cas, les missiles anti-navires ont un impact stratégique important puisqu’ils permettent de lutter efficacement contre un adversaire plus puissamment armé. Ils allient souplesse d’utilisation, légèreté infrastructurelle et puissance de feu. C’est en cela qu’ils constituent une arme de choix pour une armée qui ne peut disposer d’un grand déploiement de combat et qui doit faire face à des intentions belliqueuses. Ainsi le missile anti-navire représente un paradigme de la puissance du faible.