553 - Les droits de l’homme et l’art de la guerre

N. Lygeros

Si nous voulons vraiment défendre les droits de l’homme, nous devons être conscients et ce, avec une sagesse impitoyable et sans espoir que la guerre est omniprésente autant que le conflit de grande envergure. Non pas en raison d’un mal profond qui rongerait l’âme humaine mais à cause de la structure du tissu social lorsque ce dernier doit gérer une certaine masse. Dans ce cadre, la guerre représente un conflit de grands interêts. La guerre peut prendre diverses formes, il n’en demeure pas moins qu’elle est fondamentalement attachée à cette structure. L’homme au sens de l’humanité, ne devient dangereux que lorsqu’il est social. C’est aussi pour cette raison qu’il serait vain de chercher dans l’évolution technique des armes, un moyen de faire la paix. Ces armes ne modifient que l’apparence de la guerre non son essence.

Aussi dans la défense des droits de l’homme, le problème n’est pas comment éviter le guerre mais comment la gérer ou pour être plus précis comment la transformer. Il est donc nécessaire de la penser. De cette manière nous arrivons à une sorte de paradoxe semblable à celui de l’aphorisme «qui veut la paix, prépare la guerre». Cependant, il ne faudrait pas les confondre car comme nous venons de l’écrire, nous ne considérons pas la paix comme un état stable mais plutôt comme la partie invisible d’un conflit permanent qui représente la réorganisation des rapports inter-sociaux. Par conséquent, l’abstraction conceptuelle est de rigueur même si la guerre n’est qu’un art dont il faut étudier la praxéologie.

Dans ce nouveau cadre, nous voyons que la défense des droits de l’homme ne peut se cantonner dans une attitude passive telle qu’elle est incarnée par de nombreuses organisations humanitaires. Incapables d’envisager les données de la guerre, elles doivent se contenter d’agir a posteriori. Elles transforment donc une incapacité inhérente à leur nature en une conception dogmatique qui ne se justifie pas mais qui explique leur existence. Aider devient un moyen d’exister. Alors que les droits de l’homme n’ont besoin que de vivre. C’est pour cette raison qu’ils doivent être incorporés en tant qu’objectif dans l’art de la guerre.

Ainsi si nous voulons vraiment défendre les droits de l’homme, nous devons penser des stratégies au sein d’un conflit permanent mais pas toujours visible. Et celles-ci doivent aller au-delà des considérations économiques qui réduisent fallacieusement tout à un calcul du coût et du rendement. Il est alors naturel, non plus de défendre mais de revendiquer les droits de l’homme. Et non plus a posteriori mais a priori. En réalité, les droits de l’homme peuvent constituer une véritable stratégie de contre-offensive. Médium légal dans un conflit illégal comme l’invasion d’un pays, il peut réunir en son sein toute la puissance d’un pays, une fois que ce dernier est organisé en mymécosystème. Délocalisée par nature, son entité n’est plus une cible facile en raison de sa passivité dans un cadre classique. Elle vit en utilisant sa terre comme terrain d’action formel. Dès lors tout homme libre devient un combattant formel de la liberté. Car les forces morales deviennent, sous l’effet du myrmécosystème, des forces matérielles.

Via l’art de la guerre, les droits de l’homme se dégagent de leur gangue naturelle que représente l’humanisme, passif par nature et de son pis-aller l’humanitarisme, désespéré par essence, afin de se doter d’une structure véritablement prométhéenne qui loin d’attendre, agit avec audace à la manière d’une contre-offensive dans un milieu pensé non comme une résolution de conflits mais comme un état d’une entité caméléonienne, polymorphe et stable par son incessante instabilité..