1466 - Vues ottomanes et erreurs diplomatiques

N. Lygeros

Bien des personnes non spécialistes du sujet, considèrent que la Turquie voit son avenir au sein de l’Union Européenne. Pourtant avec quelques éléments historiques elles se rendraient compte qu’en réalité la Turquie voit son passé dans l’Union Européenne et ce particulièrement depuis l’élargissement à 25 états-membres. Car ces pays qui appartiennent à l’Union Européenne ont une histoire et celle-ci n’est pas sans relation avec l’empire ottoman. Or la Turquie se voit comme l’héritière dégénérée de cet empire. Car elle ne possède qu’une partie de cet héritage qu’elle considère comme sien. Ainsi la Bulgarie et la Roumanie qui devront intégrer l’Union Européenne en 2007, ont fait toutes deux partie de l’empire ottoman, ou pour être plus précis, elles ont subi son joug à l’instar de la Grèce mais aussi de l’Albanie, de la Bosnie et de la Serbie. L ’empire ottoman n’a jamais cessé de lutter contre l’Italie, via les Républiques de Venise et de Gênes. Il a aussi combattu l’empire austro-hongrois à plusieurs reprises. Et il s’est même emparé de l’Espagne à une certaine époque. En réalité très peu de pays de l’Europe Centrale et orientale n’ont pas eu à subir les Ottomans ou le joug de l’empire ottoman. Aussi il n’est guère surprenant que la Turquie soit si désireuse d’intégrer l’Union Européenne. Car pour elle, c’est une façon de reconquérir d’une autre manière ces pays.

La Turquie avec ses rêves ottomans, occupe une partie de l’Arménie historique, ne permet pas au peuple kurde d’avoir un état, fait subir un crime de guerre à Imvros et Ténédos, s’oppose bureaucratiquement au Patriarche et aux Grecs de Constantinople, ne veut quitter Chypre qu’elle a envahie depuis 1974. Pourtant au lieu d’aider l’ensemble de ces pays et de ces peuples, en tant qu’Union Européenne nous ne réalisons même pas le danger qu’elle représente pour nous-mêmes. Alors que chacun des pays qui se trouveront à la frontière de la Turquie pourrait nous donner des éléments précieux sur le comportement impérialiste de celle-ci, nous nous berçons d’illusions perdues pour ne pas affronter la réalité. Seulement la réalité existe et certains pays comme l’Autriche ou même la Tchéquie nous rappellent que le domaine diplomatique a lui aussi des bornes lorsqu’il s’agit de notre propre existence territoriale. Comme Chypre qui ne pouvait se résoudre à accepter son inexistence en termes de reconnaissance, nous devons lutter contre cet envahisseur que représente la Turquie. Car si nous oublions l’histoire, nous sommes condamnés à la revivre. Des erreurs diplomatiques ne sont pas seulement des erreurs, elles représentent des erreurs contre les peuples que nous devons défendre. Alors à nous de ne pas les commettre !