1413 - Les causes arménienne et chypriote

N. Lygeros

Pour des raisons historiques mais malgré tout initialement indépendantes les causes arménienne et chypriote sont reliées. Elles existent toutes les deux face au même système agressif. Elles résistent non pas pour s’approprier un objet abstrait ou convoité. Elles résistent uniquement pour avoir le droit d’exister. Seulement même ce dernier point est contesté de la part de l’état profond turc. Ces deux causes ont compris tardivement les effets bénéfiques de la dissuasion et se sont efforcées durant des années et même des décennies d’exprimer leur désir de justice. Devant l’inefficacité de cette approche, elles ont changé de phase par nécessité et sont entrées dans un conflit certes juridique mais un conflit véritable avec tout son jeu d’influences passives et actives. Cependant elles ont encore du mal à envisager une nouvelle stratégie et ce, malgré la tactique invariable du régime militaire turc. Les reconnaissances étatiques ont montré avec quelle précision juridique nous devons revendiquer nos propres droits afin de ne pas être mis en échec. Néanmoins, cette manière de faire ne peut être suffisante. Car l’exemple des Etats-Unis et l’échec de la reconnaissance en raison de pratiques illicites de la part des diplomates turcs démontre de facto les limites de cette méthodologie. De même la stratégie de mutisme chypriote a montré de manière flagrante combien elle était inadaptée. La seule contre-attaque effective et efficace a été et est le recours systématique à l’encontre de la Turquie pour non jouissance de droits. La condamnation de la Turquie par la Cour Européenne des Droits de l’Homme a montré la puissance de la notion de coût qui est si importante en stratégie. Le coût énorme d’un simple recours a forcé la Turquie à devoir se défendre. Toutes les plaintes et même les résolutions de l’ONU n’avaient jamais été capables d’un tel résultat. Car la Turquie est d’une très grande habileté en ce qui concerne le domaine de la mauvaise foi diplomatique. Malgré tout, elle s’est retrouvée démunie face au recours juridique et au coût engendré par celui-ci. Actuellement, il est nécessaire de dynamiser notre résistance de manière effective et offensive. Car toute la pression doit être exercée avant un quelconque début de négociations. Le cadre est extrêmement positif aussi nous devons l’exploiter au mieux pour la reconnaissance du génocide arménien et pour la reconnaissance de l’état chypriote. Seulement cela doit être effectué dans le cadre de la théorie du coût si nous désirons produire un véritable impact. Les Arméniens et les Chypriotes ont été spoliés de leurs droits les uns par un génocide, les autres par une invasion et une occupation. Désormais les recours doivent être systématiques afin que la diplomatie turque soit responsable de ses actes et qu’elle subisse les répercussions de sa barbarie. L’Union Européenne est un cadre de droit et nous ne devons accepter l’intolérable. Nous devons informer certes mais nous devons avant tout agir car ce sont les actes qui influencent véritablement la Turquie et rien d’autre. Les causes arménienne et chypriote doivent s’unir en ce moment non seulement en raison de leur passé commun dans la souffrance mais surtout pour l’avenir qu’elles veulent vivre : libre et indépendant.