120 - Dimitris Hordakis : l’immortalité de l’instant
N. Lygeros
L’immobilité du présent constitue l’élément le plus caractéristique de la peinture de Dimitris Hordakis. Chacune de ses oeuvres est un exemple de l’éternité de l’instant. Et c’est ce sentiment qui provoque chez le spectateur une sorte de jouissance et de complétude. Comme si son oeuvre touchait avec sa profondeur simple l’essence du désir : du désir d’immortalité. Une immortalité singulière qui combine les éléments du passé et du futur dans la composition du tableau. D’un tableau qui ne tente pas de créer un instantané du monde mais une image unifiée. Mais ce n’est pas une image c’est l’image. Et cette particularité est en relation avec l’art byzantin. Car le tableau ne représente pas la réalité : sa seule préoccupation c’est la recherche de son essence, c’est-à-dire d’une certaine manière du sens de notre monde.
La découverte de la signification se fait par la mise en lumière du détail. Ainsi quelque chose d’insignifiant peut changer complètement le sens du tableau. Par exemple dans le tableau Le visioni insolite le spectateur voit tout d’abord une femme penchée à la fenêtre regardant la mer, sans connaître la raison, sans savoir quoi imaginer. Petit à petit pourtant le regard remarque le navire qui vient du côté droit. Ce n’est pas un simple navire c’est un voilier : le signe du voyage. Mais sa direction est importante. Il ne part pas il vient. Ce n’est donc pas un voyage onirique, c’est le voyage de la mémoire, du souvenir. Le détail est essentiel à la compréhension de l’oeuvre : il a un caractère explicatif.
En effet l’artiste de temps en temps nous donne son explication. Ainsi dans son tableau La tavolozza il nous avoue avec sincérité que la mer se trouve dans sa palette. Sa palette contient le lapis lazuli et le bleu de sa pensée. En suivant Magritte il nous prévient : ce n’est pas la mer ! C’est la passion bleue du peintre.
Cette passion précisément est encore plus visible dans le tableau La contemplazione. Elle est représentée par une femme brune nue qui regarde allongée par la fenêtre ouverte notre mer. La pose de son corps exprime l’attirance double de la femme et de la mer : le corps de la jouissance. Une face de la conception grecque polymorphe.
Cependant il y a quelque chose d’autre encore car sa vue demeure cachée pour le spectateur et par cette étrange manière se crée la complexité de l’imagination. Cette femme ne regarderait-elle pas non un paysage mais un autre tableau ? Et pourquoi pas ? Ce tableau pourrait être Il pensiero convergente II.
Le charme féminin montre l’idéal de la pensée du créateur : les marbres du crépuscule. Les vagues du ciel caressent les sculptures du Parthénon et en moi je ressens la enaissance de la grécité.