121 - Les œuvres suspendues
N. Lygeros
Des colonnes ioniques soutiennent le nulle part byzantin
et de stables lignes droites créent
la structure ouverte du monde
aux objets rares :
les lettres fermées que nous ne lirons jamais
et les oeufs de bois que nous ne briserons jamais.
Les marbres dérobés volent
et nous donnent l’image du théâtre antique,
le sentiment du dieu qui emporte la déesse
du jour, du ciel et de la mer.
La marque du temps, l’aporie et le noeud gordien
flottent sur l’océan de l’éternité
et le coup de pinceau qui efface le présent
recherche le passé, l’antiquité
beauté brisée d’une frise,
art oublié des métopes,
source de grécité.
La couleur rouge demeure énigmatique :
code byzantin, signe vénitien
ou artifice érotique ?
L’Aphrodite polymorphe, femme lumineuse
et foyer diachronique de l’amour
charme le regard du voyageur méditerranéen.
Avec sa poitrine elle touche le rêve
de la nécessité et de la soif.
Avec le marbre chaud de son corps
elle transforme la passion en désir solaire :
il n’y a pas d’eau seulement de la lumière.
Et en buvant la lumière le regard dépasse
la réalité statique de l’instant
et traverse la diachronicité
du mouvement immuable.
Chaque pas vers le futur est aussi un retour
La couleur bleue brise le destin,
ouvre les voiles de la liberté
et montre le passage secret :
je n’existe pas ici seulement ailleurs.