13511 - Sur l’identification des principes stratégiques de Coutau Bégarie. (avec P. Gazzano)
P. Gazzano, N. Lygeros
Au-delà de la variabilité entre les différentes listes proposées, on parvient tout de même à identifier un certain nombre d’idées forces qui témoignent des acquis de la réflexion, du passage de la stratégie instinctive à la stratégie scientifique.
C’est ce passage que nous voulons mettre en exergue pour comprendre la nécessité de l’identification des principes stratégiques afin de créer un processus irréversible.
L’idée centrale est la recherche de la supériorité sur l’ennemi au point et au moment décisifs.
C’est à cet endroit qu’intervient l’élément temporel toujours décisif dans le combat, fondamental dans la bataille et vital dans la guerre.
Cette supériorité peut être acquise par l’accumulation de moyens, obtenue par réunion judicieuse au point choisi (principe de concentration) ou par constitution d’une force supérieure (principe de masse). « Le premier principe de la guerre est qu’on ne doit livrer bataille qu’avec toutes les troupes qu’on peut réunir sur le champ d’opération ». (Napoléon)
Les principes de concentration et de masse sont tous les deux liés à la notion de temps même s’ils semblent initialement liés uniquement à l’espace. Car ils n’ont de sens que via cette notion.
Cette supériorité peut aussi résulter de la vitesse (principe d’initiative) ou de la souplesse (principe de flexibilité) de mise en œuvre des moyens.
Les principes d’initiative et de souplesse sont liés de la dérivation de l’espace par rapport au temps qui démontre une plasticité temporelle.
Ou de l’exploitation de l’impréparation de l’ennemi (principe de surprise). Cette surprise peut être obtenue par l’innovation ou par la déception et prendre une forme temporelle, géographique, technique, doctrinale.
Le principe de surprise est polyvalent et polymorphe aussi il est difficile à mettre en place.
Cette supériorité découle aussi de l’emploi actif et intelligent des moyens disponibles (principes d’activité, de direction ou d’orientation, de coopération ou de liaison).
Ces principes nécessitent l’intelligence qui complète la notion temporelle.
Sans se laisser dominer par l’ennemi (principe de liberté d’action) : on ne doit pas compter que l’ennemi ne viendra pas, on doit se rendre inattaquable (Sun Zu). Sans gaspillage, c’est-à-dire avec une juste proposition entre les moyens disponibles et les objectifs poursuivis (principe d’économie des forces).
L’économie des forces permet de durer dans le temps et de combattre à nouveau sans perte même si cela est nécessaire.
Le tout accompagné des précautions permettant de prévenir les réactions de l’ennemi (principe de sûreté, à ne pas confondre avec l’absurde principe de précaution qui ne gère pas le risque, mais l’image du risque).
Sans ces précautions le courage se transforme certes en audace mais comme il ne tient plus compte de tous les éléments en jeu, certaines règles peuvent être négatives dans leur application sur le terrain.
Dans le cadre d’une conception d’ensemble, combinant les fins et les moyens : principes de la manœuvre de l’objectif, d’où découle celui d’unité de commandement.
L’unité de commandement permet la convergence des forces et la cohérence de l’action au moment de l’impact.
Respectant le sens commun (principe de simplicité) : « La guerre étant un métier d’exécution, toutes les combinaisons compliquées doivent en être écartées ; ce qui convient à la guerre est simplicité et sûreté ». (Napoléon).
Le principe de simplicité est toujours complexe, voilà pourquoi il laisse perplexe la plupart des spécialistes de la stratégie mais aussi les stratèges.
Ces principes doivent toujours être observées, quels que soient la situation et le rapport de forces.
Cette nécessité permet de mettre en place une théorie des schémas mentaux stratégiques.