1685 - Remarques sur l’élaboration du scaphandre
N. Lygeros
Ce qui est certain, c’est que le célèbre scaphandre que nous voyons esquissé et même décrit quant à son fonctionnement, dans les manuscrits de Leonardo da Vinci, n’est pas le premier. Il représente plutôt la continuation d’une tradition européenne dans le domaine. Il est vrai que Leonardo da Vinci précise son emploi dans le cas d’une attaque sous-marine ainsi que nous l’avons décrit dans un précédent article. Pour en revenir au scaphandre lui-même, nous trouvons une première figure dans le fameux manuscrit de Vienne qui date de 1415 mais d’après Bertrand Gille ce ne serait qu’une copie tardive de l’exemplaire original. Selon lui, l’analogie des dessins et leur caractère primitif par rapport aux œuvres du second tiers du XVe siècle, permet de faire remonter l’original à fin du XIVe siècle. Mais le plus important, ici, c’est que le manuscrit de Vienne contient des dessins qui ont été répétés dans les manuscrits de Konrad Kyeser. Parmi ces dessins, nous retrouvons celui du scaphandre. Ces manuscrits comportent des dessins qui sont de qualité nettement inférieure par rapport à celle des manuscrits de Leonardo da Vinci. Néanmoins certaines idées sont déjà présentes. Si nous voulons des détails plus précis quant au scaphandre, il est possible de les trouver dans les manuscrits de la guerre hussite. En effet dans ce manuscrit nous trouvons non seulement le dessin du scaphandrier en pleine action mais le détail de son casque. Le scaphandrier se trouve dans l’eau. Il tient dans sa main droite une corde tendue qui retient par un double crochet un pesant fardeau et dans sa main gauche la jonction de deux bouts de corde reliés qui retiennent un petit tonneau à l’horizontal. Il a à ses pieds des chaussures qui semblent dotées de lourdes semelles. Il est retenu par une corde qui le serre à la ceinture. Il porte une tunique légère. Le casque lui-même ne semble ouvert qu’au niveau des orifices oculaires. Il est de forme sphérique et possède en son sommet une sorte de tube flexible affublé de deux flotteurs sphériques. Néanmoins aucune description n’est jointe au dessin. Et il en est de même pour le détail du casque qui est illustré spécifiquement comme pour en indiquer l’importance. Cependant il est difficile de penser qu’il s’agit du même modèle que celui que porte le scaphandrier. En effet, ce modèle semble plus complexe, différent au sommet et doté d’un système de tuba sur le côté. Par ailleurs, l’auteur du dessin s’est attaché à montrer en détail les différentes sangles et boucles de ceinture qui vont toujours par paire comme il se doit. Le détail du scaphandre nous est donné par derrière afin de mieux visualiser son système de fermeture puisqu’il ne comporte pas moins de quatre sangles. Néanmoins il est difficile de penser que ce scaphandrier puisse évoluer à de grandes profondeurs. Car l’étanchéité de l’appareil semble malgré tout sommaire. Quoiqu’il en soit même dans le cadre prévu par Leonardo da Vinci ce n’est pas tant la profondeur qui est visée que la possibilité de ne pas avoir à remonter à la surface pour respirer. Cet exemple du scaphandre nous montre combien il faut être précis pour parler de véritable invention. L’objet peut être rare à une époque mais pas nécessairement innovant ni nouveau. Aussi chaque construction, chaque dessin doit être replacé avec soin dans le contexte de l’évolution des techniques et des sciences pour être appréciée à sa juste valeur.