1823 - Mise au point nomologique
N. Lygeros
Dans le cadre strictement français, la problématique de la reconnaissance du génocide des Arméniens est relativement récente puisqu’elle date de la loi du 29 janvier 2001 à laquelle il est possible d’associer l’article 4 de la loi du 23 février 2005. En réalité cette reconnaissance qui renforce localement celle du parlement européen en 1987, reste un premier pas dans le processus de réparation. Aussi dans ce sens la reconnaissance doit être complétée afin d’être utilisée comme un véritable outil juridique. Du point de vue nomologique, elle ne représente qu’un consensus formel puisque même si la loi existe, elle ne peut condamner une personne qui la viole. Il est donc plus juste de la considérer comme une déclaration de principe qui ne peut se suffire à elle-même. En termes d’architecture dans le monde du droit, elle est donc analogue à un stylobate. L’édifice principal reste encore à construire. La manifestation turque qui a eu lieu à Lyon à l’encontre du Mémorial Lyonnais pour le génocide des Arméniens, est un exemple de la permissivité de la loi. En effet, même si elle comportait des panneaux avec des slogans qui niaient l’existence du génocide des Arméniens, les organisateurs n’ont pas été inquiétés par les autorités. L’idée est simple. La loi existe mais elle ne pénalise pas. Son existence n’est pas suffisante en soi. Même si l’acte de négation est illégal, il peut exister puisqu’il n’est pas condamné. L’érection du Mémorial est un pas en avant dans le processus de réparation car elle se trouve dans le centre de la ville de Lyon. Il n’est donc plus étonnant que son existence gêne la politique turque. Il montre aux yeux de tous que les Arméniens sont capables non seulement de ne pas oublier le passé mais aussi de concevoir des édifices pour l’avenir afin que le combat de la civilisation contre la barbarie se poursuive. Il ne s’agit pas d’une stigmatisation globale comme l’affirment les autorités turques. Au contraire, ce sont les Arméniens, comme plus tard les Juifs qui ont été mis à l’écart de la société. À présent le peuple arménien se dote peu à peu de structures juridiques pour lutter contre le génocide de la mémoire. Ceci est indispensable car la propagande turque continue d’affirmer que la plupart des états dans le monde n’ont pas reconnu le génocide des Arméniens. Elle s’en sert donc pour s’ingérer dans les affaires intérieures françaises. Il n’y a donc qu’une façon de lutter contre cette subversion, c’est de compléter la loi sur la reconnaissance par une loi sur la pénalisation. C’est seulement ainsi que la propagande turque sera stoppée sur le sol français. Pour ceux qui pensent que cela n’est pas nécessaire, la manifestation turque sert de formidable contre-exemple à leur argumentation. Dans le domaine du droit, il ne suffit pas d’avoir raison, il faut encore se donner des moyens pour le prouver. Sans cela l’éthique et la déontologie sont inutiles. La propagande turque le sait bien et ce, depuis des décennies. C’est pour cela qu’elle se permet d’agir de cette façon. Elle ne veut pas être amalgamée avec le problème de la non reconnaissance de la shoah, cependant son argumentation sonne faux car pour se différencier, elle agit de la pire des façons.