2318 - Chypre et le problème européen
N. Lygeros
L’existence de Chypre au sein de l’Union Européenne met en évidence un problème non pas historique mais institutionnel. Traditionnellement nous parlions de Chypre afin de mentionner le problème chypriote à savoir l’occupation du nord de l’île par les troupes turques et ce, depuis l’invasion de 1974. Seulement depuis que Chypre est entrée dans l’Union Européenne en mai 2004, le problème chypriote a changé de nature politique puisqu’il est désormais européen. Avec les nouvelles négociations entre l’Union Européenne et la Turquie, il met en exergue un autre aspect. Cette fois, Chypre n’est qu’un état-membre de l’Union Européenne comme n’importe quel autre. Aussi sa non reconnaissance par la Turquie n’est pas d’ordre historique comme nous l’avons précisé précédemment. En d’autres termes la non reconnaissance de Chypre est une insulte faite aux institutions européennes et via ce biais à la dignité européenne. La Turquie en tant que régime autoritaire a beau jeu de faire la démocratique. Ses faits et gestes démontrent le contraire de ses dires. Elle ne souhaite aucunement respecter les acquis communautaires. Elle désire mettre un pied dans la place sans pour autant changer de tactique. Seulement elle ne se rend pas compte que l’Union Européenne ne peut remettre cause tous ses acquis en raison de cette fallacieuse candidature. La Turquie ne tente pas d’intégrer les valeurs européennes, elle s’efforce de retrouver une partie des anciennes annexions de l’Empire Ottoman. Nous ne pouvons la considérer comme une simple candidature et l’examiner avec une neutralité impartiale. Elle ne reconnaît pas le génocide des Arméniens, le génocide des Pontiques, les pogroms de Constantinople. Elle refuse donc l’histoire mais aussi la culture de la dignité humaine. Et à présent elle refuse de reconnaître un état membre de l’Union Européenne ; fait qui aggrave ses relations avec l’Union Européenne. Elle ne respecte aucunement nos valeurs humaines mais elle remet aussi en cause notre propre géostratégie puisque l’un des quatre axes principaux, c’est la conservation de la situation actuelle dans l’île de Chypre à savoir : invasion – occupation –colonisation. L’invasion a été considérée par l’O.N.U. comme une agression. L’occupation a été dénoncée par l’O.N.U comme illégale à travers ses deux résolutions. Et la colonisation est un crime de guerre qui est par nature imprescriptible. La Turquie tente de faire pression sur l’Union Européenne pour dépasser son erreur d’avoir reconnu les territoires occupés comme un état indépendant en 1983. Cependant, elle doit aussi affronter la résistance française qui en raison de son substrat égalitaire, ne peut se résoudre à accepter l’inacceptable et accueillir au sein de l’Union Européenne qui est conçue comme une diversité, un état candidat qui ne veut reconnaître un état membre.