Télégramme S. E. Carathéodory Pacha à S. A. le Grand Vézir ConstantinopleLe 26 Juin 1878 N° 52 Pour le chiffre H. Odian | | |
| Dans la séance d’aujourd’hui, le Président proposa et le Congrès admit à l’unanimité qu’on procéderait immé- diatement à la formation d’une Commission composée d’un plénipotentiaire pour chaque puissance et où l’on réglerait ce qu’il a appelé les questions de détail rédigerait les articles du traité définitif et les proposerait au Congrès par l’organe d’un rapporteur – président. Gortchakow prenant ensuite la parole a dit que la Russie aussi veut que le Sultan reste maître chez lui, mais que pour cela il faut tout d’abord que les provinces placées directement sous sa domination soient bien administrées et que les luttes d’influence entre les Ambassadeurs à Constantinople ne soient pas trop vives. Il faut dit-il que les lauriers des armées Russes soient convertis en palmes de paix. Pour faciliter cette œuvre au Congrès la Russie fait toutes les concessions possibles mais s’il y avait quelque puissance qui voulût la pousser aux extrêmes la Russie se rappellerait les devoirs de grande puissance. Beaconsfield se félicita sur la prompte convalescence du Prince, il dit que l’Angleterre aussi avait fait de grandes concessions | |
| pour assurer la paix, et qu’il espère qu’on persistera jusqu’à la fin dans le même esprit de conciliation. Le Président ajouta de son côté qu’il était content de voir la direction pacifique des travaux du Congrès, et qu’il ne cacherait pas que l’ Allemagne s’était ralliée à la France et l’Italie pour opposer leur vote uni contre toute tentative de faire prévaloir des intérêts parti- culiers sur les intérêts généraux. On passa ensuite à la discussion de notre proposition. Je la motivai précisément sur le fait de la non indépendance de la Bulgarie sur ce qu’elle n’a qu’une autonomie intérieure, tandis que les créanciers prétendent que même dans cette situation, elle doit supporter sa partie afférente dans la dette de l’Empire. Loin de pouvoir donner prise à aucune interprétation défavorable cette circonstance nous permit au contraire d’établir la situation de dépendance de la Bulgarie beaucoup plus clairement que cela n’avait été possible jusqu’ ici et c’était là précisément | |
| le but politique de ma proposition. Après un échange d’idées sur ce point Conti proposa un amendement dans lequel il substituait l’expression équitable à l’expression proportionnelle, afin de ne pas préjuger disait- il la décision concernant le montant du tribut. Comme cette expression facilitait la décision du Congrès qui n’avait pas le temps de discuter la question et qu’elle n’excluait pas mon interprétation je fis constater ce point et l’on passa outre. Immédiatement après les Autrichiens proposèrent et le Président déclara l’adoption d’une proposition ainsi conçue (1) Waddington revint sur l’exercice libre des cultes dans la Roumélie Orientale. Je répétai les même déclarations générales de tolérance que j’avais faites un jour auparavant Waddington se déclara satisfait, mais Salisbury demanda à discuter la question religieuse en général et particulièrement l’article relatif aux moines du Mont | |
| Athos un autre jour. Il déclara en outre retirer la motion qu’il avait faite hier pour la cessation du Gouverne- ment militaire des Russes en Bulgarie et dans la Roumélie, ce point dit-il étant déjà en voie d’arrangement entre l’Angleterre et la Russie. Les Autrichiens ensuite prenant la parole déclarèrent qu’on était tombé d’accord sur la rédaction de tous les articles concernant la Bulgarie. On lut les articles avec une grande rapidité, Chouvaloff dit que l’on n’était pas tout à fait d’accord. Alors Bismarc exprima son opinion en termes très catégoriques sur cette question de rédaction qui n’était pas digne de préoccuper le Congrès, et qu’ il renvoya à la Commission de rédaction. Puis il annonça que le Congrès avait presque accompli sa tâche, puisqu’il était parvenu à prévenir | |
| la guerre qui menaçait d’ éclater entre deux grandes Puissances pour cette malheureuse Bulgarie. Que maintenant il ne restait plus que quelques petites affaires relatives aux remaniements territoriaux concernant la Bosnie la Serbie le Monténégro et la Roumanie et l’indépendance de ces trois provinces abstraction faite de ce qui se rattachait à la Grèce du Danube et à l’indemnité de guerre. Il proposa en conséquence que le Congrès se réunisse demain pour en finir dans une seule séance. On put obtenir un sursis pour après demain et l’on se sépara, avec la conviction que malgré la bonne volonté du Président on en aurait bien pour deux ou trois réunions. Vers la fin de la séance Mehmed Ali Pacha présenta une proposition concernant les frontières de la Serbie. | |