6854 - Aux frontières de l’oubli

N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras

Despina : On dirait que l’histoire s’est arrêtée…

Maria : Pour que commence l’imagination !

Fiorela : Pourquoi sommes-nous seuls ?

Anna : Pour ressentir la même chose que les habitants.

Fiorela : Que veux-tu dire ?

Kostis : Au dernier recensement les habitants étaient moins de cent.

Fiorela : Vraiment ?

Klaus : Kostis dit toujours la vérité.

Giannis : Pourquoi dis-tu ça ?

Klaus : Il lit les livres.

Ermis : Bon alors il faut qu’on prenne une décision.

Manolis : Faisons quelque chose enfin.

Nikos : Je suis d’accord.

Alexandros : Il faut penser à quelque chose.

Eftichis : Le problème c’est quoi ?

Despina : Nous sommes à Gavdos ?

Maria : Nous sommes des souvenirs ?

Fiorela : Nous sommes dans un Musée ?

Anna : Nous sommes des pensées ?

Nikos : Le fruit de l’imagination ?

Ermis : C’est nous qui le déciderons.

Manolis : Mais comment est-ce possible ?

Giannis : Le maître dit qu’il faut que nous fassions l’impossible quand nous sommes élèves.

Kostis : C’est aussi écrit dans les livres.

Klaus : Nous sommes des pages de l’histoire.

Alexandros : Mais de quel livre faisons-nous partie ?

Eftichis : Nous ressemblons à Gavdos…

Manolis : C’est-à-dire ?

Eftichis : Personne ne nous accorde d’importance encore. Nous sommes très petits pour les grands.

Manolis : Et la même chose se passe pour Gavdos ?

Giannis : Exactement.

Kostis : Tandis que nous nous trouvons au bord du monde.

Giannis : Et en physique les bords caractérisent le monde.

Ermis : Pourquoi dîtes-vous que Gavdos est comme nous ?

Alexandros : Parce qu’elle est petite et qu’elle connaît beaucoup de difficultés.

Nikos : Mais qui le sait ?

Kostis : L’histoire…

Manolis : Demandons au maître de nous en dire plus.

Despina : Ne faut-il pas d’abord lui montrer que ça nous intéresse.

Maria : Despina a raison.

Anna : Mais nous au fond nous ne savons pas si elle existe

Fiorela : Comme chaque enfant qui naît.

Giannis : Pourquoi Gavdos est-elle si importante ? C’est cela la question ?

Klaus : Elle-même ou sa place?

Klaus : La terre ferme ou la mer ?

Alexandros : Juste, juste…Quelque chose se produit avec la mer.

Ermis : La mer fait partie de nos caractéristiques.

Nikos : Et les îles.

Manolis : Sans îles nous n’avons pas de mer.

Anna : Et sans mer nous n’avons pas de patrie.

Giannis : C’est pour ça que Gavdos est importante.

Kostis : C’est le centre du cercle.

Alexandros : Quand on regarde le cercle, qui voit le centre ?

Giannis : Et le centre ne fait pas partie du cercle.

Klaus : C’est pour cela qu’on ne lui donne pas d’importance.

Manolis : Et quel rapport avec les enfants ?

Alexandros : L’enfant est le centre du cercle du futur.

Ermis : C’est la plus étrange leçon que j’aie entendue.

Nikos : Et moi alors !

Maria : Et qu’allons-nous faire des couleurs ?

Despina : Oui, c’est comme des fleurs noires et blanches.

Fiorele : Ranimons-les !

Anna : Et que proposez-vous ?

Nikos : De faire une représentation théâtrale !

Ermis : Qu’est-ce que c’est que ces choses ?

Despina : Pourquoi pas ?

Maria : Ainsi on pourrait parler !

Ermis : Parler et dire quoi ?

Nikos : Que nous sommes les enfants de l’aigle des mers !

Ermis : Et qui va nous croire ?

Giannis : La vérité.

Kostis : L’homme qui n’oublie pas !

Klaus : Le maître !

Anna : Il peut nous aider à monter le spectacle…

Fiorela : Que nous montrerons en Crète.

Despina : Comme ça nous jouerons nous aussi un rôle !

Maria : Pour l’avenir de Gavdos !

Ermis : Dans ce cas, je veux moi aussi un rôle.

Nikos : Vous voyez, nous avons réussi ! Nous deviendrons les couleurs des souvenirs.

Kostis : Il faudra que notre pièce de théâtre ait aussi des péripéties…

Despina : et des sentiments.

Giannis : Et un peu de musique !

Ermis : La nôtre ! Lyre ou bouzouki…

Alexandros : Tout ça est réalisable, il suffit de le vouloir réellement.

Kostis : Nous le voulons ! Nous ne pouvons pas laisser Gavdos tomber dans l’oubli !

Giannis : Elle était aux frontières de l’oubli.

Eftichis : Heureusement que nous avons vu les souvenirs.

Ermis : Peut-être que les nôtres en ont.

Nikos : Nous leur demanderons tout ce qu’ils savent sur notre Gavdos.

Anna : Bien. Quand commençons-nous ?

Fiorela : Peut-être que l’heure est venue de partir ?

Maria : Et où irons-nous ?

Despina : Puisque nous ne savons pas où nous sommes.

Kostis : Maintenant nous savons ce que nous voulons…

Klaus : Et c’est le plus important.

Manolis : Mais pourquoi ? Je vais exploser !

Alexandros : Nous sommes dans la pensée du maître. Nous savons seulement ce que nous voulons, ça suffit à changer les choses.

Ermis : C’est terrible !

Nikos : Nous l’avons dit ! Plus que de la science-fiction.

Manolis : Car il suffit que nous le voulions tous.

Alexandros : Certainement.

Manolis : Alors je le veux moi aussi !

(Changement de phase)