708 - La Tour de Hanoï en tant qu’outil cognitif
N. Lygeros
En psychologie cognitive, dans le domaine de la résolution de problèmes nous avons deux écoles de pensées principales pour l’explication des processus cognitifs impliqués dans cette activité : d’une part l’approche fonctionnaliste de l’école genevoise qui est considérée comme néo-piagétienne et d’autre part l’approche du traitement de l’information. Cependant lorsque nous recherchons des heuristiques efficaces et ce, même au niveau de la recherche, seule la seconde permet de dépasser les difficultés rencontrées. Aussi, dans cet article, nous n’aborderons notre problématique que via ce biais. Dans l’approche de Newell et Simon, le problème surgit de l’écart qui existe entre un état de fait et un état souhaité. Et l’étude de la résolution de problèmes se ramène à celle de la compréhension. Ce processus intègre diverses connaissances dans une représentation mentale qui intègre l’espace du problème et l’ensemble des méthodes activées par la recherche de la solution. Dans ce cadre nous distinguons généralement trois catégories principales de problèmes : ceux de transformation, ceux d’induction de structure et ceux d’arrangements, même si certains problèmes comme le jeu d’échecs sont mixtes et appartiennent à deux catégories. Par contre la tour de Hanoï est un problème de transformation d’état par excellence. L’avantage de ce problème, c’est que son énoncé est élémentaire même pour des élèves en difficultés et que son espace problème est relativement important. Ainsi il offre un spectre d’étude sur le plan cognitif, suffisamment important pour déceler les heuristiques défaillantes, mais surtout pour étudier les choix méthodologiques des testés. En effet, dans ce problème la solution peut être apportée par l’heuristique de réduction de l’écart au but, l’analyse du résolveur général de problèmes, l’analyse régressive ou encore l’analogie. De cette manière, nous pouvons étudier de façon élémentaire la conception de degrés d’abstraction croissants, le déclenchement de règles d’inférences et la mise en oeuvre de stratégies pratiques. La simplicité de ce problème offre aussi la possibilité d’expliciter le polymorphisme des activités mentales sans nécessiter une grande mémoire qui représente un handicap pour les élèves qui ont une déficience au niveau du quotient intellectuel. Comme toutes les étapes du problème sont visuelles, l’élève peut voir de manière interactive ce qu’il effectue aussi il peut corriger en temps réel un choix de trajectoire inopportun ou erroné. Cela permet aussi à l’enseignant de visualiser toutes les étapes de ce processus sans être obligé d’inférer sur les raisons et les choix de l’élève. Cette description explicite et à la fois minimaliste semble très efficace dans le cadre d’apprentissages initiaux mais aussi dans la mémorisation d’un algorithme de résolution. Enfin si ce problème est effectivement inaccessible par l’élève pour une raison spécifique il peut facilement être modifié et simplifié pour se ramener au problème de la tour de Londres qui permet d’engendrer de nombreuses configurations de sous-problèmes. Par cette nouvelle variante, l’enseignant peut mesurer les progrès de son élève quant à son raisonnement et sa manière d’appréhender diverses contraintes. C’est pour l’ensemble de ces raisons que nous conseillons vivement l’exploitation de ce problème pour des enfants en difficultés.