7084 - L’accusation de Sganarelle
N. Lygeros
« Par précaution,
je t’apprends,
inter nos,
que tu vois en Dom Juan,
mon maître,
le plus grand scélérat que la terre ait jamais porté,
un enragé,
un chien,
un diable,
un Turc,
un hérétique,
qui ne croit ni Ciel,
ni Enfer,
ni loup-garou,
qui passe cette vie en véritable bête brute,
en pourceau d’Épicure,
en vrai Sardanapale,
qui ferme l’oreille
à toutes les remontrances qu’on lui peut faire,
et traite de billevesées tout ce que nous croyons. »
L’accusation de Sganarelle
est digne en tout point
pour la société du compromis.
Il est certes dommage de savoir
que Molière lui-même jouait
ce personnage social
néanmoins son esprit subversif est là.
Car qui mieux que Sganarelle
pouvait critiquer la société
à travers ses accusations
à l’encontre du grand seigneur
méchant homme ?
La censure ne s’est d’ailleurs nullement méprise
puisqu’elle s’en est prise à lui
pour sa bouffonnerie sacrilège.
Dom Juan semble être
la cible idéale pour tout
il n’y a rien de faux en cela
mais la raison est autre.
Son existence n’est qu’un prétexte
pour justifier l’impensable
et réaliser une utopie
comme si c’était une vision.
Cela permet d’agir
sans subir les conséquences.
Cet acte peut déplaire
mais il est plus beau
que celui de Galilée.
De plus il montre que le mythe
n’est que l’essence de l’histoire
et que seule l’œuvre
peut créer véritablement l’être.