La chaise n’était plus suffisante pour contempler l’œuvre. Rapidement l’idée du fauteuil devint une nécessité. Chaque nouveau dessin, chaque nouveau croquis lui rappelait son existence. Il devait penser à l’autre, au spectateur, à l’admirateur, à celui pour qui la future œuvre aurait son importance. Même si cela paraissait étrange, l’idée même que le spectateur pût s’asseoir sur le même fauteuil que le créateur de l’œuvre, créait une nouvelle relation, sans doute même un lien, un pont temporel. Aussi lorsque le fauteuil arriva, il s’empressa de le monter afin qu’il fût prêt à ses multiples fonctions. C’était comme s’il avait été conçu pour cet atelier, comme s’il avait été toujours là. Et puis après l’avoir installé, il imagina son modèle dans cette pose asymétrique qui permettait de contempler le commencement du monde et il se mit à écrire sur son carnet, les premières notes de cette nouvelle partition. Ainsi le fauteuil avait rempli sa première mission et c’était pour cette raison qu’il avait été imaginé dans son espace mental puisqu’il appartenait désormais à son futur.