764 - Ludwig III
N. Lygeros
[On entend en voix off le monologue intérieur d’un personnage muet.]
Pensée de Ludwig : Il n’y a donc personne pour entendre le silence…
(Silence.)
Tous parlent mais personne n’écoute vraiment.
(Un temps. Il regarde la scène vide.)
Combien les hommes sont rares…
(Il semble chercher quelque chose.)
Cherchons-nous quelque chose de nouveau ou quelque chose que nous avons perdu ?
(Il attend comme s’il attendait une réponse.)
La perte précède-t-elle toujours la recherche ?
(Idem.)
Je ne recherche que le silence.
(Un bruit.)
Mais ici, il ne peut exister !
(Un temps.)
Je ne recherche que l’impossible…
(Un personnage traverse la scène, sans le regarder.)
Je ne recherche que l’invisible…
(Eclairage du public.)
Et je ne vois que la présence.
(Il s’approche du public.)
Je ne sais pas s’ils m’entendent.
(Un homme dans le public fait un signe de tête.)
Être seul sur scène ou seul parmi la foule…
(Il regarde l’homme du public.)
Telle est la question…
(Il prend un air triste.)
Ils sont si seuls… (Un temps.)
Et je n’ai qu’eux !
(Il s’asseoit, il semble épuisé.)
Toute cette solitude collective me blesse…
(Il semble incompris.)
Certes tout n’est pas compréhensible…
(Il redresse la tête.)
Et pourtant !
(Il regarde la lumière.)
L’humanité est rare mais la rareté ne semble pas humaine.
(Un temps.)
Les mots semblent n’être qu’une lamentation sur le mur du silence.
(Silence.)
Nous sommes enclavés dans une structure ouverte…
Peu importe son nom, son absence est omniprésente comme le temps et le silence.
(Il se relève.)
Nous sommes des morceaux du temps
comme les maux sont faits de souffrance
comme les mots sont faits de silence.
(Il recule pour la première fois.)
Le malentendu n’est pas seulement absurde
et l’absurde n’est pas juste un malentendu.
(Silence.)
Si les mots sont absurdes
c’est que le silence est un malentendu !
(Un autre bruit.)
Chaque son assassine le silence
et meurt dans sa tombe.
(Un temps.)
Notre tombe
n’est ni chute, ni nausée
seulement
crépuscule des dieux.