8631 - Sur les stratégies européennes
N. Lygeros
Avant d’aborder les stratégies européennes, nous devons dire un mot sur l’utilisation de ce pluriel, non pas au niveau du mot stratégie, dans ce domaine il n’existe rien de surprenant, mais plutôt sur le qualificatif d’européen. Si nous nous limitions à l’espace de l’Union Européenne, le simple ajout du mot Union aurait justifié le titre sans avoir besoin de tout autre justification. Cependant ce n’est pas le cas. Si nous nous limitions à la simple géographie, alors il faudrait justifier les guerres et les batailles qui se situeraient hors de ce cadre. Cependant ce n’est pas le cas. Sinon nous nous en remettions uniquement au contexte historique, alors nous risquerions de tomber facilement dans le piège de l’anachronique. En réalité, notre cadre est celui de la variété européenne. Il est donc unique et multiple à la fois, ce qui nous permet d’étudier l’européanité sur le plan humain et temporel comme un sous-ensemble de l’intersection de l’Humanité et du Temps. De cette manière, il nous est possible de faire une synthèse des différentes analyses et d’aborder l’ensemble à l’instar d’un mix stratégique qui exploite différentes stratégies dans le même but. Les stratégies européennes ont donc à présent une définition propre. Quant à l’outil sur lequel nous allons nous baser, c’est la topostratégie afin de compléter les lacunes de la géostratégie lorsque nous abordons de manière diachronique cette entité abstraite que constitue la variété européenne. La topostratégie a été définie dans une précédente note, aussi nous ne préciserons que la mise en exergue des relations par rapport à la géométrie.
De cette manière, nous abordons les stratégies européennes de manière intrinsèque. Cette approche explique aussi que cette entité est traversante par rapport aux civilisations mais au-delà des préoccupations sociales et locales. Il semble, à présent, naturel de nommer plus précisément les trajectoires dans ce cadre, par la notion de grande stratégie puisque celle-ci est capable par sa définition et sa structure, non seulement d’englober des stratégies mais aussi, et cela est encore plus important, car il s’agit là d’un raisonnement non uniforme, sa capacité à aller à l’encontre de ces dernières, et ce, même lorsque celles-ci sont immergées en son sein. Cette manière d’aborder l’ensemble du problème est encore plus compréhensible lorsque nous avons à l’esprit le schéma mental de Grothendieck à savoir les généralisations successives d’entités afin de repérer des structures capables de supporter celles-ci sans pour autant dégénérer. Aussi via la topostratégie nous englobons l’ensemble, en ayant un outil formel générique qui donne des informations globales qui seraient inaccessibles sans cette approche car le local même multiple ou infini ne peut donner l’équivalent. Maintenant il est possible de placer plusieurs joueurs dans cet espace afin de mettre en évidence leur comportement stratégique dans le cadre formel de la théorie des jeux, prise dans le sens développé par Nash. Ainsi nous ne nous préoccupons pas de la notion de coopération puisqu’il existe un cadre global qui dépasse la différence coopération – opposition dans des jeux à somme différente de zéro.