992 - Solution de repli ou solution de rechange
N. Lygeros
De nombreux citoyens européens se demandent comment réagir face à la candidature de la Turquie, en raison de la complexité de l’état des négociations. Il est évident que beaucoup d’entre eux considèrent que cette question n’aurait jamais dû être soulevée par les parlementaires mais les faits sont là. Dans le cadre de la politique diplomatique de l’Union Européenne et de la politique agressive de la Turquie, il semble logique que la situation actuelle soit devenue une réalité. Mais à présent, il est inutile de tergiverser à ce sujet, la seule chose qui importe c’est comment résoudre le problème. Aussi certains tentent de trouver une solution de repli sans se rendre compte qu’il existe déjà une solution de rechange.
Toute une série de conditions fondamentales pour les acquis européens ne sont pas remplies aussi la question de l’adhésion proprement dite n’a pas de sens à moins que l’Union européenne ne rejette son histoire, sa culture et son éthique. Aussi nous sommes dans un cadre purement géostratégique et géopolitique. Ce qui est important pour l’Union Européenne c’est la stabilisation, au sens démocratique du terme, de ses frontières afin que son interface avec le monde extérieur ne soit pas critique. Pour cela, il n’est pas nécessaire de faire entrer ce candidat dans l’Union européenne mais de signer avec lui un accord sur une convention privilégiée à l’instar de celles que nous avons avec la Suisse et avec l’Islande et que nous aurons sans doute avec la Russie. Cet accord permet d’éviter les tensions créées par le contrôle conjoint de la politique de l’état et offre l’opportunité de modifier sensiblement le dogme du pays afin que celui-ci soit plus proche des valeurs européennes. Cette solution de rechange représente en termes de théorie des jeux, un équilibre de Nash dans le cadre d’une stratégie dominante aussi elle est indépendante de considérations autres que strictement stratégiques. De plus, elle permet d’influer sur les sphères extérieures qui seraient heureuses d’enclaver dans l’Union européenne un allié manipulable. Enfin comme il s’agit d’un véritable accord, il ne peut être jugé comme un refus strict.
Ainsi, il ne s’agit pas de rechercher une solution de repli hypothétique ou même utopique, mais d’exploiter une solution de rechange effective et pragmatique. L’application formelle de la théorie des jeux et la reconnaissance de l’équilibre de Nash associé permet de surmonter des difficultés qui semblent irréductibles. Aussi il ne faut pas se convaincre du caractère inéluctable de la chose mais de la possibilité de modifier et de stabiliser efficacement nos frontières dans une région à haut risque.