1731 - L’influence de Francesco di Giorgio Martini sur Leonardo da Vinci
N. Lygeros
Francesco di Giorgio Martini (1439-1502) fait partie des personnalités puissantes qui ont influencé tout d’abord le jeune ingénieur Leonardo da Vinci et ensuite son génie. Plus complet et plus ample que ses prédécesseurs, Francesco n’a véritablement été découvert qu’au XXe siècle. Cependant, même si sa personnalité nous est encore inconnue, il est clair que son esprit a embrassé de nombreuses connaissances et que celles-ci grâce à sa vision, ont été réorganisées pour engendrer de nouveaux schémas dans les machines. Quant à son contact avec Leonardo da Vinci il est attesté en 1490 et il eut lieu au congrès des architectes et ingénieurs réunis pour l’achèvement du Dôme de Milan. Son œuvre principale est le traité d’architecture civile et militaire. Il en existe plusieurs manuscrits mais le plus important c’est celui d’Ashburnham de la Laurentine. Il est certes incomplet et comporte essentiellement la partie mécanique de l’œuvre mais le plus important c’est qu’il soit annoté par Leonardo da Vinci lui-même. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il lui a été attribué par erreur. Il faut aussi signaler que d’après le spécialiste du domaine Bertrand Gille, l’œuvre du mécanicien est incontestablement plus originale que les autres. Un exemple concret, c’est celui de la turbine hydraulique. En effet, sur ce point il effectue une véritable innovation. Les roues verticales sont naturellement plus répandues en raison de la simplicité du montage. Les roues horizontales ont un moindre rendement surtout à cette époque où elles ne représentent en réalité qu’un assemblage sommaire de simples palettes. Cependant la turbine hydraulique telle qu’elle est dessinée dans le traité de Francesco permet de résoudre les problèmes de la roue horizontale. Son dessin est extrêmement précis et permet de lui attribuer sans conteste cette réalisation. Un autre exemple tout aussi concret est celui du transport des colonnes. Cette difficulté était connue depuis l’Antiquité cependant à la Renaissance, les ingénieurs voulaient la résoudre à l’aide de moyens mécaniques qui nécessitaient moins d’hommes. Le problème est particulièrement difficile lorsqu’il s’agit de colonnes monolithiques. Dans le Traité nous trouvons de nombreuses études avec des variations plus ou moins importantes qui permettent à Francesco di Giorgio Martini de démontrer tout son savoir-faire dans le domaine. Mais sans doute le plus important, c’est de remarquer que Leonardo da Vinci a fait de nombreuses copies de ces machines comme s’il voulait en comprendre précisément l’ensemble du fonctionnement. Ainsi même si les spécialistes ne lui attribuent pas un véritable génie mécanique, il est clair que son astuce a indiscutablement influencé la partie mécanique de l’œuvre de Leonardo da Vinci. Aussi il ne s’agit pas pour nous de remettre en cause l’attribution de réalisations mais bien de préciser la continuation des idées dans le monde des constructions mécaniques. L’existence de Francesco di Giorgio Martini nous permet d’ancrer l’œuvre de Leonardo da Vinci dans le contexte de son époque. De cette manière, nous pouvons encore mieux mettre en évidence son apport et la qualité de ses recherches. La possibilité d’observer ses sources nous offre l’occasion d’étudier l’évolution de sa pensée conceptuelle via le travail d’ingénierie.