1172 - Du Siècle des Lumières à la Constitution Européenne
N. Lygeros
Le débat sur la Constitution Européenne remet à l’ordre du jour ce que nous appelons l’esprit européen. Et ce dernier qui semble si abstrait au point d’être identifié à un aspect seulement technique de la gestion, redevient tout à fait concret même au niveau philosophique et politologique du terme. En effet, l’analyse de la Constitution Européenne ne permet aucun doute quant à son esprit. L’influence française et en particulier l’apport du Siècle des Lumières mais aussi les acquis de la Révolution sont tout simplement indéniables. Il est extrêmement difficile de ne pas interpréter la Constitution Européenne comme une extension naturelle de la déclaration des droits de l’Homme puisque, ne serait-ce dans ce domaine, il s’agit d’un renforcement considérable. Les droits de l’homme ne pourront plus représenter une abstraction pour certains pays de l’Union Européenne puisque ce sera celle-ci qui sera amenée à les protéger, et ce à un niveau supranational. Il est bien sûr évident que dans le domaine social, d’autres avancées sont nécessaires. Néanmoins l’apport de la Constitution Européenne est véritable. Sans rechercher un processus fédéraliste, elle permet de conserver une ambiguïté qui n’est pas inutile sur le plan stratégique. Que l’Europe évolue, c’est certain mais il n’est pas nécessaire que ce processus soit prévisible. Et pour cela, la Convention Européenne remplit bien son rôle puisqu’elle se comporte à l’instar d’une structure ouverte. Par ailleurs, elle renforce le processus d’élargissement contrôlé et ainsi elle ne laisse pas libre cours à n’importe quelle adhésion comme certains pourraient le craindre en France. Dans ce sens, l’Union Européenne se dote d’une structure qui lui permet d’avoir une stature et une envergure sur le plan international puisque pour la première fois nous voyons apparaître des éléments concrets quant à une politique étrangère commune. Ainsi ce renforcement structurel qui ne rigidifie pas pour autant l’Union Européenne, est un moyen efficace pour intervenir dans le monde et ce, à plusieurs niveaux. Il faudra sans doute convaincre certaines personnes réticentes par nature qui confondent ce changement de responsabilités avec une politique commerciale de délocalisation. Il faudra sans doute revenir à des éléments culturels et historiques analogues afin de montrer qu’il ne s’agit aucunement d’une rupture politique mais d’une évolution cohérente qui va dans le sens des fondateurs de l’Union Européenne. Il est vrai que rien n’est certain, dans le domaine géostratégique dans le sens positif du terme. Cependant lorsqu’il s’agit de déterminer des circonstances et des évènements qui concourent à l’émergence d’un point négatif alors l’analyse est plus aisée. Ainsi la non ratification représente pour chacun des états de l’Union Européenne un point qui remet en cause son évolution et pour la France qui appartient au moteur européen il est certain que cela constituera une sévère remise en cause de son statut au sein de l’Union Européenne mais aussi de son dynamisme fonctionnel.