1089 - Descartes et da Vinci
N. Lygeros
«Ότανσκέφτομαι…μαθαίνω να ζω,μαθαίνω ναπεθαίνω.»
Leonardo da Vinci
À partir du cogito ergo sum de Descartes, nous avons une intervention explicite du rôle de la pensée dans le domaine de la pensée. Il ne s’agit pas de la première fois bien sûr mais le principe cartésien a eu la chance d’avoir une large diffusion au moins dans la mentalité française. Cependant nous avons éprouvé la nécessité de le compléter par l’apport de l’oeuvre de Dostoïevski que nous avons exploité dans notre pièce de théâtre intitulée Les Démiurges ainsi que dans différents articles associés. Ainsi via l’apport dostoïevskien, le principe cartésien s’est transformé en la proposition suivante : je pense, donc je souffre et donc j’existe. Par ailleurs dans les notes de Leonardo da Vinci nous retrouvons une idée analogue exprimée de la manière suivante : quand je pense… j’apprends à vivre, j’apprends à mourir. L’activité cognitive permet donc l’acquisition d’une connaissance sur la vie et sur la mort. Néanmoins pour être plus précis, il ne s’agit pas de la mort comme une fin en soi mais d’un processus qui mène à la mort sans pour autant que cela ne signifie mourir peu à peu. Il y a une symétrie dans la phrase de da Vinci mais elle est ensuite brisée par l’ordre de la phrase. La mort semble donc plus importante et sa compréhension permet de saisir la vie. Le point commun de ces deux entités, c’est le processus de réalisation qui permet la conceptualisation. Dans Leonardo da Vinci, l’apprentissage de la mort n’est pas caractérisé et c’est pour cette raison que nous le complétons par l’introduction de la souffrance dostoïevskienne. L’intelligence via la pensée au contact de la mort comprend la signification de la vie. Ainsi comme nous l’avons décrit dans notre article grec Εν αρχήο θάνατο, la mort est le point de référence du monde polycyclique. Nous retrouvons ainsi le titre Mémoire du futur de notre oratorio Prométhée et Athéna. L’intelligence en tant que futur enclavé dans le passé a plus facilement accès à la mort qui malgré sa nécessité représente un choix. Tandis que la naissance qui est due au hasard représente un ordreindépendant de la volonté. Nous ne pouvons choisir que de mourir mais non de naître. Ainsi la réalisation humaine, le devenir et non l’être, passe nécessairement par la compréhension du point de référence que constitue la mort. Et cette compréhension s’active par la souffrance qui provient de l’empathie de l’intelligence. Ainsi la phrase de da Vinci est potentiellement plus puissante que celle de Descartes puisqu’elle contient un autre principe qui sert d’intermédiaire nécessaire à la transformation annoncée. Seulement les notes de da Vinci ont été oubliées pendant près de deux cents ans. Cela montre encore une fois les bouleversements profonds qu’elles auraient engendré dans l’évolution de la pensée humaine. À travers son oeuvre nous pouvons néanmoins enrichir nos propres pensées afin que cet oubli momentané par l’humanité ne soit pas permanent.