897 - La compréhension en tant que compression
N. Lygeros
Le point crucial en ce qui concerne l’univers, c’est sa complexité et l’apparente difficulté à le décoder. Cela conduit à s’interroger sur la validité de la phrase qui est attribuée à Albert Einstein à savoir que la chose la plus incompréhensible au monde, c’est que le monde soit compréhensible. Car il semble au moins au premier abord que cela conduise à un paradoxe mental. A moins que la compréhension en tant que procédure mentale ne permette de le résoudre et de le dépasser. Seulement pour cela, il est nécessaire d’introduire la notion de simplicité au sens de Gregory Chaitin. Cette idée qui s’inspire des travaux de Gottfried Leibniz et particulièrement de son discours sur la métaphysique, peut être interprétée comme une exploitation systématique du rasoir d’Occam afin d’éviter toute redondance. Elle amène donc à considérer la plus petite théorie possible qui explique une masse donnée d’informations, ce qui en d’autres termes correspond à la théorie la plus élégante. Dans ce sens, nous pouvons dire que cette théorie comprend, dans les deux sens du terme, le maximum d’informations. Elle correspond donc à une compactification de l’information et c’est en ce sens qu’elle permet d’interpréter la compréhension comme une compression sans pour autant établir une équivalence sémiologique. La compression apparaît donc comme une opération bijective en termes d’information puisqu’il n’y a pas de perte malgré l’élimination de la redondance. Il est vrai que cela a aussi pour conséquence de rendre la compréhension instable puisque la moindre perte occasionne une partie qui ne peut être retrouvée. Une autre manière de le voir et sans doute plus positive même si elle est équivalente, c’est qu’elle est incompressible. Ainsi nous pouvons effectivement qualifier la compréhension de compression et la théorie élégante, d’incompressible. Celles-ci transforment peu à peu le caractère incompréhensible de la complexité de l’univers en information incompressible de la simplicité théorique et créent ainsi un pont entre le mental du monde et le monde du mental.