6184 - Transcription de la lettre 14 de Paul Faure. (17/06/1994)

N. Lygeros

Paris, où je suis de passage -> 10/07,
le Vendredi 17 Juin 1994
Cher Nik, maître es-graphismes
Votre « cabeza de toro de Talapi (Buger » m’est d’autant plus
agréable qu’il me permet un brin de réflexion : renversée,
elle ressemble prodigieusement à une grenouille, si bien
que je me demande dans quel sens il convient de lire
la fable de La Fontaine « La grenouille qui veut se faire aussi
grosse que le bœuf », soit, en renversant l’ordre des termes,
« Le bœuf qui se faire aussi petit que la grenouille »,
soit « Le savant qui veut se faire aussi petit que l’ignorant. »
Merci donc, et pour l’image et pour votre message.
Pour avoir vu de très près, et à la loupe et sous plusieurs éclai-
rages, l’épingle en argent de Platanos HM 498, et diverses photos
d’agrandissement, je crois pouvoir distinguer les signes suivants :
6184a.jpg
ce qui, en signes normalisés et en lecture dextroverses, devient
6184b.jpg

Philologiquement, Uge(n)s peut fort bien être le nom d’une
divinité, telle que un des surnoms d’Artémis
(Callimaque, H. à Art., 204), ou encore 6184c.jpg, nom d’une des
Vierges Hyperboréennes de Délos et également surnom d’Artémis
(Hérodote, 4, 35 et les dexicographes), étant donné que la
labiovélaire q (kw) devient régulièrement β, π, φ, en grec classique.
En outre, l’Anthologie nous apprend que 6184d.jpg était le surnom
de Némésis à Rhamnonte : 6184e.jpg chant en l’honneur d’Artémis.

La seconde partie de l’inscription est beaucoup
plus difficile à interpréter, car 1°) les signes
et , ne sont pas sûrs ; 2°) et
sont sans équivalent en lin. A ou B. Même
si pouvait être une forme élargie du pronom νιν
ce que fait au juste Tanunkna(s) n’est pas clair, après
le verbe de consécration *aissaram qui précède. J’ai
pensé à une signature d’artisan ou à une commande, mais
rien n’est sûr tant que, comme je vous l’ai déjà écrit,
on ne remplit pas une double condition : recopier fidèle-
ment les signes, leur donner leur place exactement
dans le syllabaire. Personnellemnt, je me fie bien plutôt
à la classification de Plugliese-Carratelli, qui est aussi
celle de J. Raison et de M. Pope (corpus transnuméré du
linéaire A, 2e édition, Peeters, Louvain-la Neuve, printemps 1994)
qu’à la classification et aux assimilations AB de Godart
et Olivier (GORILA, vol. 5, Athènes-Paris, 1985, p. XXII-XXIII).
Vous avez raison pour la lecture des lettres peintes
et vous obtiendrez certainement des résultats intéressants
pour les écritures gravées du lin. A, si vous les informa-
tisez correctement. Je vous avoue ne rien connaître
dans votre spécialité et vous fais confiance.
με κριτικά και κρητικά αισθήματα