1796 - Dura lex, sed lex
N. Lygeros
La société de l’oubli considère que des causes comme celle de la reconnaissance du génocide, n’ont pas lieu d’être car elles enveniment les relations sociales. Alors certains parmi nous se sentent obligés de faire l’apologie de cette lutte. Ils se cantonnent sur des bases consensuelles afin de ne pas brusquer, ils utilisent une philosophie de bon marché afin de ne pas provoquer. Ils oublient cependant l’essence. La philosophie ne peut que provoquer. C’est dans sa nature de lutter contre l’inertie sociale. Le combat des droits de l’homme ne peut être minimisé sous prétexte de plaire. Nous ne pouvons accepter cette tendance générale qui consiste à transformer l’humanisme en humanitaire uniquement en raison du fait qu’il est plus facile à faire passer. Il ne s’agit pas de tromper un ennemi neutre en camouflant notre cause. Le génocide des Arméniens est un crime contre l’humanité et rien ne peut l’atténuer ni l’amoindrir. Le crime contre l’humanité est une notion précise comme le montre l’article 211-1 à propos du génocide.
« Constitue un génocide le fait, en exécution d’un plan concerté tendant à la destruction totale ou partielle d’un groupe national, ethnique, racial ou religieux, ou d’un groupe déterminé à partir de tout autre critère arbitraire, de commettre ou de faire commettre, à l’encontre de membres de ce groupe, l’un des actes suivants :
– atteinte volontaire à la vie ;
– atteinte grave à l’intégrité physique ou psychique ;
– soumission à des conditions d’existence de nature à entraîner la destruction totale ou partielle du groupe ;
– mesures visant à entraver les naissances ;
– transfert forcé d’enfants.
Le génocide est puni de la réclusion criminelle à perpétuité. »
Et l’article 212-1 précise un cadre plus général pour le crime contre l’humanité.
« La déportation, la réduction en esclavage ou la pratique massive et systématique d’exécutions sommaires, d’enlèvements de personnes suivis de leur disparition, de la torture ou d’actes inhumains, inspirées par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux et organisées en exécution d’un plan concerté à l’encontre d’un groupe de population civile sont punies de la réclusion criminelle à perpétuité. »
Ces lois peuvent sembler rigides et sévères pour les non-initiés mais il ne faut pas oublier qu’elles sont sensées condamner un génocide, un crime contre l’humanité. Ces notions n’ont rien d’abstrait, en termes de droit, elles sont tout à fait concrètes.
Ainsi le mémorial lyonnais du génocide des Arméniens n’a pas à justifier sa présence. Celle-ci est nécessaire non seulement en raison de la gravité du crime commis mais aussi en raison du fait qu’il n’est toujours pas reconnu comme tel par la Turquie qui se veut par ailleurs européenne. Nous ne devons donc pas entrer dans un dialogue qui se voudrait convivial sous prétexte de ne pas blesser les opinions. Un génocide, un crime contre l’humanité est désormais un crime condamné par la loi. Dura lex, sed lex.