5470 - Traduction des remarques générales de Pauli sur l’état présent du problème de la matière

N. Lygeros

Chacune des théories dont nous avons discuté, a ses avantages et ses inconvénients propres. Leur échec commun nous incite pourtant, à résumer spécifiquement les difficultés et les défauts communs à toutes. C’est le but de toutes les théories du continuum de déduire la nature atomique de l’électricité à partir de la propriété que les équations différentielles exprimant les lois physiques ont seulement un nombre discret de solutions qui sont pourtant régulières, statiques et sphériquement symétriques. En particulier, une telle solution devrait exister pour chacun des genres positif et négatif de l’électricité. Il est clair que des équations différentielles qui ont cette propriété doivent être d’une nature particulièrement compliquée. Il nous apparait que cette complexité des lois physiques parle d’elle-même contre les théories du continuum. Pour cela il faudrait, du point de vue physique, que l’existence de l’atomicité, en elle-même si simple et si basique, soit interprétée de manière simple et élémentaire par la théorie et ne devrait pas, pour ainsi dire, apparaître comme une astuce de l’analyse. De plus, nous avons vu que les théories du continuum sont forcées d’introduire des forces spéciales qui gardent les forces répulsives de Coulomb à l’intérieur des particules électriques élémentaires, en équilibre. Si nous supposons que ces forces sont électriques dans leur nature, nous devons assigner un sens absolu au potentiel 4-vectoriel, ce qui conduit à des difficultés. L’autre alternative, que les particules électriques élémentaires se tiennent ensemble par les forces gravitationnelles, est cependant contrée par un argument empirique de poids. Nous devrions attendre, dans ce cas, qu’une relation numérique simple existe entre la masse gravitationnelle de l’électron et de sa charge. Actuellement, le nombre sans dimension relevant e/(m√k) (k = constante gravitationnelle ordinaire) est de l’ordre de 1020 ! Il doit être demandé aux équations du champ de tenir compte de l’asymétrie (différence en masse) des deux genres d’électricité. Il est cependant aisé de voir que cela est en contradiction avec leur covariance générale, d’un point de vue formel. Dans le cas statique, les équations du champ contiennent le potentiel électrique φ comme une variable, excepté les gik (i, k = 1, 2, 3 ou i = k = 4 ). En tant que cas spécial de la covariance générale, les équations différentielles  doivent  en  particulier, être   covariantes  par rapport  à  l’inversion du  temps x’4 = -x4. Mais alors φ devient –φ, alors que les gik restent inchangés (dans notre cas, gik = 0 pour i = 1, 2, 3) Si par conséquent φ, gik (gi4 = 0) est une solution des équations du champ, alors –φ, gik (gi4 = 0) est aussi solution, en contradiction avec une asymétrie de deux genres d’électricité. Quelqu’un pourrait éviter une telle conclusion en introduisant des fonctions d’action irrationnelle, comme nous l’avons indiqué. Mais en premier lieu, les équations du champ deviendraient encore plus compliquées, et, en second lieu, le choix d’une branche non ambigüe d’une fonction d’action ne s’effectue pas en général de manière covariante : la covariance n’existe plus i.e. pour l’inversion du temps x’4 = -x4. Finalement, un doute conceptuel devrait être mentionné. Les théories du continuum utilisent directement le concept ordinaire de force du champ électrique, même pour les champs à l’intérieur de l’électron. Cette force du champ est néanmoins définie comme une force agissant sur une particule test, et comme il n’y a pas de particule test plus petite que l’électron ou le noyau d’hydrogène, la force du champ à un point donné de l’intérieur d’une telle particule semblerait être non observable, par définition, et donc être fictive sans contenu physique.

Quelque soit l’attitude à adopter dans les détails de ces arguments, il semble certain que : de nouveaux éléments qui sont étrangers au concept de continuum du champ, doivent être ajoutés à la structure fondamentale des théories développées pour l’instant, avant que quelqu’un ne parvienne à une solution satisfaisante du problème de la matière.