215 - Commentaires sur un aphorisme de Sénèque
N. Lygeros
Sénèque : Plutôt que de savoir ce qui a été fait combien il vaut mieux chercher ce qu’il faut faire.
Cet aphorisme est caractéristique de la sagesse de Sénèque ainsi que du courant stoïcien qui influença sa pensée. Il est construit sur un rythme binaire qui opère une dichotomie temporelle entre les actes passés et ceux à venir, tout en plaçant l’homme dans le présent, au centre de ce choix. Il crée ainsi une opposition entre le savoir qui est associé au passé et qui de ce fait demeure une connaissance que nous pourrions qualifier de nos jours d’humaniste, et la recherche associée au futur dont l’équivalent cognitif serait la pensée prométhéenne.
Il met aussi en évidence l’aspect positif de l’acte et incite la réfléxion à aller dans son sens. En effet pourquoi étudier des problèmes que l’on ne peut résoudre puisqu’ils ont eu lieu dans le passé. Nous pouvons aussi y voir une critique de l’aspect rhétorique de la philosophie pour la philosophie. Car, quel serait le sens de la philosophie si elle ne représentait pas une réflexion sur la société, capable de la faire évoluer par ce biais ? La réflexion doit mener à l’action si elle ne veut être réduite au rang de concept.
La sagesse de l’aphorisme est aussi perceptible par le fait qu’il constitue un conseil fondamental pour les relations humaines, sociales et politiques. Pourquoi se cantonner dans la mémoire des problèmes quand il s’agit de résoudre les problèmes de l’avenir. Les hommes ne peuvent se contenter de vivre dans le passé surtout si celui-ci est douloureux. Enfin sur le plan politique, cette sagesse est similaire à la notion d’amnistie. Cet achèvement suprême de la diplomatie qui demeure l’unique solution dans un conflit qui doit cesser même s’il semblait juste au moment de son commencement.